Guylaine: Un homme qui sortait d’un immeuble m’a tenu la porte pour me faire entrer et, en bonne femme polie que je suis, je l’ai simplement remercié, mais il m’a aussitôt répondu qu’il ne l’avait pas fait pour moi. Je n’ai pas compris sa remarque et par conséquent son geste. Je me sens larguée, je ne sais plus comment réagir au quotidien. Certains codes contemporains m’échappent complètement sans doute, aidez-moi à les clarifier, si vous pouvez. Comment interpréter cette situation? Qu’en pensez-vous, mes contacts Facebook?

Madeleine: Quel malotru! Tu aurais dû l’envoyer promener.

Simon: Comme il sortait, il a peut-être cru que tu forçais ton entrée et t’a trouvée mal élevée. C’est une possibilité, si je me mets à sa place.

Nicole: Qui tient encore la porte aux autres aujourd’hui? C’est tellement has been. C’est sans doute un résidu de comportement vieux jeu chez un croulant de baby-boomer. Il aurait fallu lui enjoindre de mettre enfin les pieds dans notre époque et lui souhaiter la bienvenue au 21e s.

Guylaine: Non, il devait avoir la trentaine, guère plus.

André: Ah! le regret après le geste, j’y lis une culpabilité manifeste, il y a chez lui du ressenti indigne, comme on dit aujourd’hui. Ce type avait quelque chose à se reprocher, c’est évident. Un désir caché, sans doute, qu’il a réprimé en lançant une excuse maladroite.

Jeanne: C’est manifestement une tactique classique de dragueur: il a cherché à plaisanter en prétendant qu’il ne tenait pas la porte pour toi, même s’il l’avait clairement fait. Façon convenue d’engager la conversation. C’est une forme de harcèlement. La prochaine étape, c’est la main aux fesses.

Louise: Oui, la galanterie est toujours suspecte. Il faut vraiment s’en méfier.

Guylaine: Est-ce qu’on confond désormais courtoisie, galanterie et flirt? Il n’y a plus de nuances?

Paul: Doit-on maintenant avoir honte d’être galant ou simplement gentil? Doit-on vraiment éviter tous les menus égards dans les relations humaines qui en font le sel et s’en repentir si on y cède?

Aline: Désolée, mais moi j’aime la courtoisie, ça fait partie de notre civilisation. On n’a qu’une vie après tout et j’ai besoin de cette douceur ritualisée dans mon quotidien. Et d’ailleurs, je la pratique tout le temps avec tout le monde à égalité, femmes, hommes, enfants. J’éduque aussi mes deux fils à incorporer cette politesse minimale dans leur comportement.

Rolande: Guylaine, tu n’as pas exigé qu’il s’excuse de te parler ainsi? Moi, c’est ce que j’aurais au moins fait, parce que tu ne lui avais rien demandé.

Guylaine: Je n’ai pas été insultée, j’étais juste confuse et décontenancée par la disparité entre son geste attentionné et son commentaire qui l’annulait. Je ne savais pas comment décoder sa réaction et, avec mon esprit de l’escalier, j’ai ruminé cette question toute la journée, sans trouver la réponse.

Lorraine: Guylaine, tu es en souffrance éthique, pour prendre le vocabulaire à la mode.

Guylaine: Peut-être, mais en quoi est-ce que cela m’aide à comprendre cette situation apparemment simple? Est-ce que je complique inutilement les choses?

Germain: Ce n’est pas le geste en lui-même qui est choquant, mais sa réaction verbale, qui me parait fort déplacée dans les circonstances. Il aurait dû plutôt répondre poliment et sobrement à ton remerciement: “Je vous en prie, madame.” C’est tout.

Jacqueline: Ou il aurait pu ajouter en souriant et en y mettant la distance de l’autodérision: “Mais pour vous dire toute la vérité, ce n’était pas intentionnel de ma part, donc je n’ai aucun mérite particulier.”

Normande: Tu ne lui as pas demandé quelle était alors sa motivation ? Quel hypocrite!

Benoît: Pourquoi ne pas lui avoir répliqué que tu le remerciais en fait de bien vouloir fermer la porte derrière lui?

Ginette: Ou que tu le remerciais qu’il prenne la porte…

Corinne: Et de se dépêcher de sortir avant qu’il ne goûte à ton teaser.

Jean-Marie: Ou qu’il ne reçoive ton coup d’experte en karaté dans ses c….

Laurence: Moi, je lui aurais offert une pièce de monnaie en réponse à son arrogance.

Gérard: Par curiosité, voici l’opinion dépassionnée de ChatGPT:

“Mon ChatGPT: Un homme, en sortant d’un immeuble, tient la porte à une femme qui veut entrer. Elle le remercie, mais il répond qu’il ne l’a pas retenue pour elle. Comment la femme peut-elle interpréter cette situation?”

ChatGPT:

“L’interaction que vous décrivez est certainement inhabituelle et peut prêter à confusion. Il y a plusieurs façons d’interpréter cette situation:

1.  L’homme a pu être ironique ou sarcastique, même si ce n’est pas très clair sans plus de contexte.

2.   Il se pourrait qu’il ait tenu la porte ouverte pour une autre raison et ait voulu préciser qu’il ne l’avait pas fait spécifiquement pour cette femme.

3.  Il se peut que l’homme ait simplement tenu la porte par un réflexe courant de courtoisie comme il le fait habituellement pour toute personne, quel que soit son sexe.

4.  Peut-être que c’est une question de différence culturelle, ce genre de malentendu est fréquent de nos jours dans les sociétés de plus en plus multiculturelles.

5.  L’homme a peut-être ouvert la porte pour quelqu’un d’autre, mais la femme a mal compris et pensé que ce geste s’adressait à elle. C’est une possibilité si la femme n’y prêtait pas attention et qu’il y avait quelqu’un d’autre derrière elle.

6.  L’homme l’a peut-être ouverte pour lui-même et a ensuite décidé de laisser passer la femme en premier.

7.   L’homme tenait peut-être la porte à la femme, mais a pu se sentir mal à l’aise à l’idée qu’elle le remercie. Il a pu grandir dans une culture où les hommes ne sont pas censés ouvrir les portes aux femmes, ou, au contraire, il a peut-être estimé qu’il n’était pas assez chevaleresque.

8.  L’homme essayait peut-être de faire valoir un point sur l’égalité des sexes. Il a alors pu penser qu’ouvrir la porte à une femme était un geste sexiste, et sa remarque visait peut-être à tenter de remettre en question ce stéréotype en se défendant de l’avoir tenue pour elle.

9.  Il est également possible que l’homme ait des opinions sur les rôles de genre ou des idées politiques féministes qu’il voulait implicitement communiquer, même si cela semble un peu tiré par les cheveux pour une interaction aussi brève et furtive.

10.  Enfin, il pourrait simplement avoir un sens de l’humour particulier ou une manière étrange ou un peu hautaine, voire maladroite de socialiser et d’engager une conversation. Beaucoup de personnes cherchent ce genre de liens faibles quand la solitude afflige une grande proportion d’urbains. Il voulait peut-être attirer l’attention de la femme pour créer ce lien passager.

11.  Dans tous les cas, il est difficile de savoir avec certitude ce que l’homme voulait dire par sa réaction verbale et par son geste sans plus d’informations.

12.  En fin de compte, la seule façon de savoir avec certitude ce que l’homme voulait dire aurait été de le lui demander. Sans doute que la femme se sentait mal à l’aise ou confuse de cette situation, ce pour quoi elle a laissé tomber l’affaire.

13.   Voici d’autres attitudes que la femme pourrait adopter dans une telle situation:

• Sourire et dire: “Merci quand même.” Cela montre qu’elle n’est pas offensée par l’attitude de l’homme bien qu’elle ne soit pas sûre de ses intentions.

• Demander à l’homme pourquoi ou pour qui il tenait alors la porte ouverte, si ce n’était pas pour elle. Cela peut donner l’occasion à l’inconnu de clarifier ses intentions. C’est un moyen direct d’obtenir une réponse.

• Faire savoir à l’homme qu’elle apprécie le geste même si elle n’en était pas précisément la bénéficiaire. C’est une façon de souligner le caractère bienveillant de cet acte que tout le monde aurait peut-être avantage à adopter dans la vie quotidienne, quand une politesse minimale s’impose.

• Répliquer avec un esprit avenant et primesautier, ce qui pourrait être un moyen de désamorcer la situation et de dissiper tout quiproquo, dans un style blagueur ou doucement ironique: “Ça tombe bien, je vous remerciais en fait de me laisser entrer avant de vous en aller. On ne voit plus d’homme aussi poli que vous de nos jours. J’applaudis, monsieur, bravo!”

• La femme doit faire ce qui lui semble le plus aisé pour elle dans cette situation. Il n’y a pas de réponse juste ou fausse.

• Il existe aussi sûrement plusieurs autres façons possibles d’interpréter la situation.”

Guylaine: Ça alors! Ne trouve-t-on pas curieux et même paradoxal que ce soit le robot qui fasse preuve de nuance et de générosité compréhensive envers l’autre, plus que nous autres humains? C’est le monde à l’envers! Moi, je suis encore plus déboussolée qu’avant, avec toutes vos réactions et cette longue liste de sages conseils colligés et débités par des algorithmes. Je suis sans doute trop simple pour notre société actuelle! Merci tout de même, Facebook.