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N’ayons pas honte d’être francophones

Ni honte, ni gloire. 

La Francophonie, quand on vit en Belgique “non flamande”, on est tombé dedans en naissant, sans rien demander ni revendiquer. Sans glorifier un passé français souvent (ré)inventé au fil des époques et des pouvoirs successifs, mais sans avoir honte de parler une langue si belle, si riche et partagée, selon le dernier rapport en date de l’Observatoire de la langue française, par plus de 320 millions de personnes dans le monde.

Aujourd’hui, derrière le terme de francophonie, on mélange souvent plusieurs notions, parfois contradictoires. Et il convient sans doute de séparer le bon grain de l’ivraie.

Avec un regard “postcolonial”, on pourrait craindre que la francophonie soit la volonté de maintenir en vie, artificiellement, une “certaine idée de la France”, de son histoire rêvée ou imposée, de sa place dans le monde et de sa domination culturelle sur certains pays d’Afrique ou d’Asie. Un héritage bien lourd du temps des conquêtes et du partage de la planète en différentes puissances.

On préfère évidemment se dire que la francophonie, c’est la promotion du français, la volonté d’ouverture sur le monde, d’échanges, de liberté.

Pour un journal comme Le Soir, c’est bien sûr dans ce sens que nous l’envisageons. Et c’est aussi dans ce sens que nous continuons, au fil des ans, à publier une chronique sur la langue chère à nos lecteurs. D’abord par les billets de Cléante, puis via les textes de Michel Francard et aujourd’hui par ceux, brillants, d’Anne-Catherine Simon, linguiste à l’UCL.

À chaque fois, ces chroniques ne sont pas des façons de figer le français dans le marbre, en nous dressant en gardiens de l’orthodoxie et d’un français classique et immuable, mais au contraire d’étudier les évolutions de la langue — parfois même les encourager — et de “visiter” le français un peu partout dans le monde pour comprendre comment il évolue pour se réinventer selon les endroits, les accents, les peuples qui le pratiquent.

Ce qui est vrai pour la langue l’est aussi pour la francophonie en général, qui ne doit pas être un concept figé qui répète à l’envi comment la France est — était? — importante dans le monde, mais une volonté de partager un outil commun pour le défendre, certes (pourquoi utiliser un anglicisme quand notre langue est si variée?), mais pour le faire évoluer, en respecter les composantes et en tirer le meilleur.

Ni honte ni gloire, donc. Ni honte de défendre une langue qui a toute sa place dans le monde, riche de son passé et de ses valeurs. Ni gloire d’en faire un outil de propagande au service d’un pouvoir refermé sur lui-même ou de valeurs du passé que nous ne partageons pas aujourd’hui.

Quand on voit toute la richesse culturelle que nous apportent celles et ceux qui pratiquent le français sur la planète, on se dit que l’ouverture aux autres n’est pas un problème, mais bien une solution aujourd’hui, dans nos sociétés polarisées. Et que l’universalisme peut aussi passer par la francophonie.


N’ayons pas honte d’être francophones

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Belgique
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